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Lucy : l’australopithèque a probablement fait une chute mortelle d’un arbre (31/08/16)

Lucy, une chute mortelle
L’australopithèque dont le fossile est daté de 3,18 millions d’années, vient enfin d’être autopsié ! D’après une nouvelle étude il apparaît que c’est une chute de l’hominidé qui serait à l’origine de sa mort…

Lucy a -t-elle chuté mortellement d'un arbre ? Lucy, un hominidé mondialement connu
Avec un squelette complet à  40%, la découverte de Lucy en 1974 a eu un succès médiatique exceptionnel. Les paléoanthropologues Donald Johanson et Yves Coppens avait mis au jour les restes de « la grand-mère de l’humanité… ». Il faut dire qu’à l’époque les restes d’hominidés n’étaient pas si nombreux qu’aujourd’hui. On sait maintenant que si le fossile d’Australopithecus afarensis est toujours aussi important pour la compréhension de l’évolution humaine il apparaît que cette espèce ne semble pas être directement liée à notre lignée. C’est plutôt un cul de sac de l’évolution, sans descendance. Depuis sa découverte, des générations de chercheurs se sont penchées sur ses ossements pour étudier sa stature (1,10 mètres et 30 kg, comme un chimpanzé), retracer son mode de vie, son régime alimentaire, ses modes de locomotion (bipède et arboricole). On avait même imaginé sa mort par noyade dans le documentaire de Jacques Malaterre l’Odyssée de l’espèce
Un fossile très complet : 40% du squelette a été retrouvé ! Image John Kappelman, UT Austin.


Un squelette qui  n’avait pas encore tout dit
Les restes fossilisés de Lucy appartiennent à l’Ethiopie et sont désormais exposés au Musée d’Addis-Abeba. Mais les ossements ont fait une tournée mondiale et ont été régulièrement prêtés à des musées pour des expositions. Lors d’un passage aux Etats-Unis en 2008, des chercheurs du Texas ont obtenu l’autorisation de scanner les ossements aux rayons X en haute résolution. Ils ont pu ainsi obtenir au total 35 000 images des restes osseux sous formes de fines tranches permettant d’analyser leur structure intérieure, les cassures, les tensions et les plus petits morceaux.
L’étude de ces images, publiée dans la revue Nature, a permis de comprendre les circonstance de la mort de Lucy il y a 3,18 millions d’années, ce qui est un délai logique pour obtenir l’autopsie d’un être préhistorique…
On sait déjà beaucoup de chose sur Lucy.  Australopithecus afarensis dont le squelette montre qu’il pratiquait la bipédie passait certainement une grande partie de sa vie dans les arbres.  La nuit il devait se construire une sorte de nid dans les arbres comme le font encore certains  primates aujourd’hui.  

Une fracture symptomatique
L’équipe dirigée par l’anthropologue John Kappelman a mis en évidence que les traces de fractures sur l’humérus du bras droit de Lucy sont caractéristiques d’un certain type d’accident. Lorsqu’une personne chute d’une hauteur, ou qu’elle se protège lors d’un accident en voiture, elle positionne ses bras en avant pour amortir le choc. Il en résulte une fracture de compression typique de l’humérus que l’on retrouve à l’identique sur le squelette de Lucy.
Kappelman a également observé des fractures similaires mais moins graves sur l’épaule gauche, la cheville droite, les genoux, le bassin et la première côte. Ce sont, pour les membres de l’équipe, les marques d’un traumatisme important. Les scientifiques ont calculé que les forces qui ont fracturé le bras de Lucy étaient équivalentes à une chute d'une hauteur d'environ 13,7 mètres (une hauteur comparable à celle d’un immeuble de 4 étages ou d'un grand arbre comme un acacia) à une vitesse d'environ 60 kilomètres/heure.
Par ailleurs, les brisures des os ont des arêtes vives et nettes, ce qui indique qu’elles n’ont pas eu le temps de cicatriser, elles sont donc perimortem.

Rensonstitution de la chute de Lucy
Image tirée d’une vidéo d’animation décrivant le scénario de la chute de l’arbre de Lucy.
Image de Valerie Lopez/John Kappelman.

Un accident dont les circonstances sont débattues
Selon les chercheurs qui ont publié les résultats de l’étude, il apparaît clairement que Lucy est simplement tombée des hautes branches d’un arbre. Elle est à priori morte immédiatement sous le choc. N’y ayant pas à l’époque de falaise (ou de voiture !) à proximité du lieu de l’accident, l’arbre semble être la meilleure solution pour expliquer la violence du choc.
Dans les conclusions de l’étude, les chercheurs suggèrent que les adaptations des australopithèques qui facilitent la bipédie terrestre ont peut-être comme conséquence une moindre habilité et aisance pour se déplacer dans les arbres. Cela pourrait être la cause de la chute mortelle.

Cette hypothèse de l’arbre, reprise par la presse, ne fait cependant pas l’unanimité dans la communauté scientifique. C’est à la fois les causes de l’accident, ses traces sur les ossements ainsi que la potentielle chute d’un arbre qui posent problème…

Pas d’accord
Pour Donald Johanson, qui a toujours pensé que Lucy était bipède et ne montait plus dans les arbres, il apparaît que « les os d'éléphant et les côtes d'hippopotames semblent avoir le même genre de fracture … Il est peu probable qu'ils soient tombés d'un arbre !".
Tim White est sur la même longueur d’onde lorsqu’il déclare que «  ce type de fracture ressemble à celui des os de toutes sortes d'animaux trouvés à Hadar… Ces fractures résultent d’un processus géologiques ante mortem ».
L'anthropologue Owen Lovejoy est également septique au vu du nombre de fractures. Il trouve que les côtes de Lucy, par exemple, sont fracturées à tellement d’endroits que c’est impossible à réaliser avec une seule chute...

D’accord
Pour Pascal Picq, l’étude est sérieuse et documentée. Pour approuver les conclusions il indique que des études montrent qu’un quart des chimpanzés que l’on connaît ont sur le squelette des marques indéniables de fractures qui ont été réduites. La chute d’un arbre est donc possible, même pour un primate…
Yves Coppens déclare avec humour que « c’est une triste nouvelle, pauvre Lucy ! » Il n’a pas a priori d’hostilité contre cette thèse qui, après tout, en vaut une autre, surtout si le chercheur l'argumente bien.
Ceci est un «scénario plausible pour la disparition de Lucy », indique le paléoanthropologue William Jungers. " L’analyse complète et détaillée de ce type de fracture par rapport à la vaste littérature clinique humaine sur les traumatismes du squelette ... est particulièrement convaincante. "

C.R.

Sources :
Perimortem fractures in Lucy suggest mortality from fall out of tall tree
France TV Info
ScienceMag
ScienceDailly



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