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Paul Tournal, fondateur de la Préhistoire
Paul Tournal, fondateur de la préhistoire
Jean Guilaine
Chantal Alibert
Paul Tournal fut un touche-à-tout de génie. Tour à tour géologue, archéologue, journaliste et défenseur du patrimoine, il incarne à lui seul l’esprit de progrès et d’enthousiasme qui caractérise le XIXe siècle. Dans les années 1830, il découvre, en explorant les grottes de Bize, dans l’Aude, des vestiges qui l’autorisent à lancer l’hypothèse d’un homme « anté-historique ». Cette notion marque la naissance de la Préhistoire. Il fut ainsi pionnier de l’idée, de nos jours admise et banale, que l’homme a une histoire qui remonte bien avant l’Antiquité.
Ce livre est tout à la fois le récit d’une découverte révolutionnaire et l’évocation des passions intellectuelles et politiques qui ont traversé cette France encore hésitante entre tradition et innovation, monarchie et république.
Jean Guilaine et Chantal Alibert mettent en lumière la contribution majeure et pourtant méconnue de cette personnalité hors norme dans l’invention de la Préhistoire.
Odile Jacobs
320 pages
15,5 x 24 cm
Paul Tournat fait partie des précurseurs de la préhistoire. Pharmacien à l’origine il s’est passionné pour la géologie et la préhistoire. Il est très peu connu et sa carrière a été cachée derrière celle de son contemporain Jacques Boucher de Perthes.
Alors qu’il avait l’intuition d’un homme préhistorique bien avant les autres « savants » de l’époque
Ce défaut de notoriété est peut-être du à ses prises de positions politiques ou religieuses…
Les auteurs
Jean Guilaine, membre de l’Institut, est professeur honoraire au Collège de France (chaire Civilisations de l’Europe au Néolithique et à l’âge du bronze) et à l’École des hautes études en sciences sociales. Il a récemment publié La Seconde Naissance de l’homme, qui a été un grand succès.
Chantal Alibert, docteur en histoire, est spécialiste de l’histoire patrimoniale du XIXe siècle.
Sommaire Paul Tournal, fondateur de la préhistoire
« Froid dans la forme ,mais ecellent diable dans le fond » Après cette présentation du contexte familial, retournons à Paul Tournal lui-même. Un portrait, commandé par la Commission archéologique lors de son décès, a fixé l’image d’un homme mûr au regard sévère. Réalisé par Jean-Pierre Montséret, ce tableau a été peint d’après une photo de 1866 (Tournal a alors 61 ans). Il a trôné durant de nombreuses décennies au-dessus de la cheminée de la salle des Gardes du musée. Comment déceler dans ce personnage à l’aspect austère l’homme attachant et passionné qu’il était ? « Je suis comme dit Michel [Chevalier] très froid dans la forme, mais excellent diable au fond. » Tournal est un homme de contact pour qui la parole a une extrême importance. Il ne laisse pas ses interlocuteurs indifférents. Dans la correspondance qu’il reçoit, il apparaît comme une personne aimable dont la compagnie est recherchée. Il est fidèle en amitié, toujours prêt à rendre service, ne ménageant ni ses efforts ni ses conseils. Ainsi Arcisse de Caumont, fondateur de la Société française d’archéologie, écrit dans l’hommage qu’il consacre à Paul Tournal en 1872 : « Depuis 1834, nous n’avions pas cessé d’entretenir avec lui des relations qui ont été très agréables et très fructueuses. » Son neveu Léonce insiste sur sa bonté : « Il poussait cette bonté d’âme si loin qu’il ne pouvait sans la plus vive émotion voir couler le sang d’autrui… son esprit de charité s’étendait sur tout ce qui souffre, et il n’en exceptait pas les pauvres petits animaux dont il aimait à peupler son foyer domestique ». » Quels sont les plans de carrière de Tournal ? A-t-il d’ailleurs eu à un moment donné l’intention de se lancer dans une véritable carrière ? En partant pour Paris en 1838, tenait-il à s’installer durablement comme journaliste ? Est-ce un moyen, comme il l’écrit lui-même, d’améliorer le parcours militaire de son neveu ? Les circonstances ont favorisé son retour dans sa ville natale, malgré une curiosité toujours en éveil, un réseau de relations très dense, un goût prononcé pour les voyages et l’inconnu. L’attachement pour sa ville est peut-être l’élément essentiel de sa personnalité. Il l’écrit de façon très émouvante à sa famille : « Le plus beau jour d’un voyage est celui où l’on rentre chez soi’. » Son plan de carrière en fait, c’est Narbonne. Son équilibre, son bonheur, il les a trouvés au service de son musée, toujours curieux des agitations du monde, correspondant avec ses amis mais entouré de sa famille. Outre ses occupations liées à la sauvegarde du patrimoine narbonnais, son engagement politique, qui est une constante de sa vie, ses recherches scientifiques, il est évidemment pharmacien. La pharmacie de la rue Droite occupe une place particulière dans sa vie. Jusqu’en 1854, l’officine est confiée à Caunes. Dans une lettre adressée à Léonce, Tournal évoque le départ de celui qu’il considérait comme son ami : « Caunes nous quitte, il prend la pharmacie de Rieux. Cet événement me brise et me plonge dans une extrême mélancolie… Que deviendra-t-il ? Il va peut-être achever de se perdre. Il faudra qu’à son âge, il renonce à ses habitudes, qu’il s’impose des privations, qu’il se mette sérieusement au travail. Quel avenir pour lui ? Comment pourra-t-il se tirer d’embarras? Encore une fois, je suis anéanti. Je sais bien qu’il n’avait pas de conduite, qu’il a fait des fautes, qu’il n’a pas su donner une direction à ses enfants, que sa femme n’a pas de sens commun, que nous avons fait pour lui tout ce que nous avons pu, mais enfin, il est bien malheureux et je tenais à lui. » C’est un dénommé Bourjade qui prend la relève et s’occupe avec l’aide d’un assistant de la bonne marche du commerce. La pharmacie, située au cœur de la ville, à deux pas de la mairie, est également le lieu privilégié où se rencontrent tous ceux qui aiment discuter avec lui, savants de tout horizon ou simples habitants de la cité. Tournal est très attaché à sa maison. En 1854, un projet d’alignement semble concerner la boutique. On envisage de reculer sa demeure : « Une maison que l’on a habitée pendant un demi-siècle fait presque partie de votre existence, c’est pour ainsi dire une seconde peau et je ne vois pas comment on peut se réjouir de la prévision d’être écorché’*.» C’est une époque douloureuse dans la vie de Tournal. Cette année-là, il perd successivement sa mère puis son père. Léonce, désormais lieutenant de vaisseau, fait la campagne de Crimée sur le navire-hôpital La Gorgone. Atteint par une maladie du larynx, il doit abandonner sa carrière militaire et prend sa retraite en 1862. Trois ans plus tard, il se marie avec Caroline Alberny. Entre-temps, Tournal et sa sœur ont déménagé pour une maison plus vaste située 4, rue Ancienne-Porte-des-Catalans ». Ce projet, Tournal l’envisageait depuis longtemps attendant la retraite et le retour de son neveu à la vie civile : « Je rêve de ton mariage… |





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