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Des familles de néandertaliens pratiquant le cannibalisme sur un site espagnol.
L’étude ADN de restes néandertaliens sur le site d’El Sidrón en Espagne permet de décrypter la composition de la cellule familiale mais également des pratiques cannibales…
Espagne – Publiée en décembre dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences, l’étude des ossements fossilisés de 12 Néandertaliens découverts en Espagne fournit à la fois la première preuve génétique d’une organisation familiale et des indices d’un cannibalisme à grande échelle chez cette espèce.
Proceedings of the National Academy of Sciences
La découverte
Les restes fossilisés vieux d’environ 49 000 ans de 12 Néandertaliens, difficilement exhumés durant ces 10 dernières années sur le site d’El Sidrón (principauté des Asturies, nord de l’Espagne), ont été étudiés par l’équipe de Carles Lalueza-Fox, de l’Institut de biologie évolutive de l’Université Pompeu Fabra à Barcelone.
Publiés en décembre 2010, les résultats de cette recherche ont la particularité d’apporter des éléments sur deux aspects distincts de la vie des hommes de Néandertal : structure sociale et comportement cannibale.
Des marques sur les os
Certains des restes découverts – consistant essentiellement en des dents, des mandibules, des os longs et des fragments de crâne – portent des traces caractéristiques de boucherie : « il y a plusieurs marques différentes sur beaucoup d’os, appartenant aux 12 individus, notamment les ‘traditionnelles’ marques de découpe destinées à désarticuler ces os et à en enlever les insertions de muscles, et des fracturations des os longs pour en extraire la moelle », dit Lalueza-Fox.
L’analyse génétique
Confirmant une détermination du sexe de chaque individu par sa morphologie, une recherche du chromosome Y (présent seulement chez le mâle) dans l’ADN nucléaire, donne pour ce groupe d’individus la structure suivante : 3 hommes adultes, 3 femmes adultes, 3 adolescents (peut-être tous mâles), 2 jeunes enfants (l’un de 5 à 6 ans et l’autre de 8 à 9 ans), et un bébé.
L’étude de l’ADN mitochondrial (ADNmt), uniquement hérité, lui, de la mère, donne des résultats fort intéressants. Les 12 Néandertaliens sont issus de trois lignées maternelles distinctes : une lignée A comptant 7 individus, dont les 3 hommes, une des femmes et au moins l’un de ses enfants ; une lignée B comprenant 4 individus, dont une des femmes et un ou deux de ses enfants; une lignée C représentée uniquement par la troisième femme adulte.
Et les conclusions
Les 3 hommes du groupe étaient donc apparentés (frères, oncles-neveux…), tandis que 2 des 3 femmes étaient d’origines distinctes, toutes deux différentes du noyau familial masculin.
Pour les auteurs, ces données suggèrent ici l’existence d’un groupe social constitué d’hommes de la même famille, de leurs épouses respectives – « récupérées » ou échangées dans d’autres clans – et de leurs enfants. Basé sur une organisation dite patrilocale, où les femmes devenues adultes quittent leur clan d’origine pour venir vivre dans la famille de leur compagnon et y élever leurs enfants, ce mode de vie évite la consanguinité.
Tentative de reconstitution
« Les preuves archéologiques, paléontologiques et géologiques indiquent que ces individus représentaient tout ou partie d’un groupe social de Néandertaliens contemporains entre eux, qui moururent à peu près en même temps [il y a 49 000 ans], et furent ensevelis peu après par un effondrement géologique. Les traces [d’anthropophagie] pourraient indiquer que l’ensemble correspond à un groupe de Néandertaliens, ‘traités’ [mangés] en surface, par d’autres Néandertaliens (…), les hommes modernes n’étant pas encore présents en Europe à cette époque », concluent les chercheurs.
Sources
Pour la Science
Globaltalentnews,
Livescience
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