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La diffusion de l'agriculture en Europe (27/02/11)
Une diffusion "en mosaïque" de l'agriculture en Europe

Comment l'agriculture est-elle née en Europe ? Descendons-nous de fermiers du croissant fertile d'Asie Mineure, venus coloniser notre continent, occupé jusque-là par des chasseurs paléolithiques ? Ou bien de ces derniers, qui se sont « reconvertis » en cultivateurs ? Un débat trop simpliste au goût de chercheurs irlandais et britanniques, amateurs de crânes anciens... 

BléL'étude
Le Dr Ron Pinhasi, de l'University College de Cork (Irlande), spécialiste de la transition Mésolithique/Néolithique, et le Dr Noreen von Cramon-Taubadel, de l'Université du Kent à Canterbury (Royaume-Uni), experte dans la reconstruction de généalogies humaines via des marqueurs morphologiques, ont scruté les crânes fossiles  de 30 populations anciennes d'Europe et du Proche-Orient : des chasseurs-cueilleurs du Mésolithique aussi bien que des agriculteurs du Néolithique. Leur thème de recherche était l'identité et l'origine des premiers cultivateurs d'Europe.
Les résultats qu'ils ont obtenus montrent qu'après la dispersion physique, en Europe centrale, d'agriculteurs venus du Proche-Orient ou d'Anatolie, deux lignées biologiques ont cohabité, avec des flux génétiques limités entre elles : l'une caractérisant des communautés agricoles réparties à travers le centre de l'Europe, l'autre des communautés de chasseurs-cueilleurs localisées dans les régions périphériques du continent - Scandinave, Baltique, Ukraine et Russie - et adoptant certains éléments culturels auprès des agriculteurs.

Un double enjeu  
C'est un débat qui occupe depuis longtemps les archéologues. La transition vers l'agriculture en Europe a-t-elle été le résultat d'une diffusion biologique - démographique, en l'occurrence : arrivée de fermiers du Proche-Orient et assimilation ou même remplacement des populations de chasseurs-cueilleurs indigènes ? Ou bien le résultat d'une diffusion culturelle : adoption progressive, par ces derniers, des pratiques agricoles inventées par leurs lointains voisins de
l'est ?
De récentes études vont dans le sens de la première hypothèse, en montrant une origine génétique proche-orientale de fermiers du Néolithique en Allemagne. Mais certains observateurs mettent en garde contre une extrapolation hâtive. Et, effectivement, la présente recherche montre que la deuxième hypothèse - la diffusion culturelle des pratiques agraires - a sans doute joué aussi.
Outre cet apport à la question de l'origine de l'agriculture, cette étude suggère aussi que des populations européennes d'aujourd'hui pourraient retracer leur ascendance jusqu'à la période paléolithique, soit avant 10 000 BP (bien que des études ADN antérieures se soient vraisemblablement heurtées au brassage génétique dû à de plus récentes migrations de populations (post-Néolithique), intra-européennes ou encore venues d'Asie).

Craniométrie ‘sans gènes'
Pourquoi une étude craniologique ? Selon les auteurs, l'ADN ancien disponible est trop disparate en termes de distribution chronologique et géographique, et les études à partir de l'ADN de populations actuelles donnent des résultats incomplets et controversés, de même que les données purement archéologiques (vestiges d'objets fabriqués) : « Jusqu'à présent, l'étude archéologique et l'analyse de l'ADN européen ancien et moderne ont donné des résultats peu concluants au sujet de ces hypothèses », résument-ils.
Selon eux, il a déjà été montré que la craniométrie (mensurations du crâne) peut être utilisée comme une approximation fiable de l'information génétique, dont elle est une expression. « Les distances [= les différences] craniométriques entre ces populations ont été rapprochées de modèles géographiques (...) représentant les hypothèses de transmission biologique ou culturelle  [de l'agriculture] », dit le texte de synthèse de l'étude. Une technique de généalogie difficile à appréhender, donc, pour des non-spécialistes... Les conclusions, elles, sont heureusement plus abordables.  

Mosaïque : le maitre-mot
« La transition vers l'agriculture en Europe n'a pas impliqué le remplacement complet des populations de chasseurs-cueilleurs autochtones, malgré le flux de gènes important venu de l'Asie du sud-ouest », conclut le résumé de l'étude.
Des phases intermédiaires ont probablement existé, par exemple des populations boréales continuant leur mode de subsistance de chasseurs-cueilleurs dans le nord-ouest de la Russie, tout en adoptant, dans un premier temps, l'usage de la poterie, considéré comme une marque distinctive du Néolithique.
À la place des deux modèles concurrents et mutuellement exclusifs de diffusion de l'agriculture - le biologique contre le culturel - se dessine donc un modèle en mosaïque mêlant les deux approches.

F. Belnet

Sources :
Royal Society Publishings,
ScienceDaily,
Forwhattheywereweare.blogspot

 


 


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